Introduction
Comment pouvons-nous faire de notre mieux pour les années 2020?

Où se trouve le juste milieu entre des questions urgentes et une vision à long terme?

La plupart des fondations investissent une dotation et octroient un pourcentage du rendement de leurs investissements (au moins 3,5 % d’un point de vue légal) sous forme de contributions à des organismes à vocation sociale ou environnementale. Cette approche a permis à la Fondation McConnell d’avoir accès à du capital pendant plusieurs années tout en conservant assez d’argent pour des problématiques futures. À la lumière des défis actuels, nous sommes reconnaissants que J.W. McConnell ait eu la bonne idée de mettre la Fondation sur pied en 1937 au lieu de verser annuellement tout son capital philanthropique.

Toutefois, au mois d’octobre 2018, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a statué qu’il ne restait que 12 ans pour aborder la crise climatique. Il n’en reste plus que neuf, alors que les émissions continuent d’augmenter au Canada.

En 2020, d’autres urgences se sont manifestées : une pandémie mondiale avec ses conséquences sociales, en particulier pour les communautés marginalisées, et une crise de crédibilité liée au racisme systémique parmi plusieurs institutions.

Alors que nous faisons face à cette réalisation urgente et à ce que cela implique pour nos travaux, des questions s’imposent pour toutes les fondations. Devrions-nous dépenser une plus grande partie de notre dotation? Combien? Y a-t-il des moyens de mieux gérer nos dépenses actuelles? Si nous dépensons trop aujourd’hui, comment pourvoir aux problèmes plus complexes qui surgiront en 2050 ou en 2100?

Comment partager le pouvoir et l’influence?

Il court actuellement un vent de critique quant à la tendance du secteur philanthropique à décider de ce qu’il y a de mieux pour autrui, et de sous-évaluer les connaissances et les relations locales des organismes communautaires. Certains affirment que les fondations devraient renoncer à leur pouvoir et leur influence, mais une autre option serait de les partager.

Lorsque la Fondation McConnell a amorcé sa collaboration avec le Winnipeg Boldness Project, qui vise à améliorer la vie des enfants et des familles dans le quartier North End de la ville, principalement habité par des Autochtones, les leaders locaux ont insisté pour que les décisions importantes soient prises par la communauté. La Fondation a accepté et ainsi permis à l’organisme de mettre en pratique une gouvernance polycentrique dans le cadre de laquelle les organismes sociaux, les parents, les leaders autochtones, les chercheuses et chercheurs et les partenaires financiers sont consultés sur une base régulière.

Bien que Boldness connaisse du succès à l’échelle locale, l’organisme a parfois demandé un appui pour influencer les gouvernements, trouver d’autres sources de financement et entrer en contact avec des organismes menant des travaux similaires ailleurs au Canada.

Les fondations peuvent-elles modifier leur rôle pour partager leur influence plus ouvertement avec des partenaires communautaires? Est-ce un moyen efficace pour les fondations de soutenir des groupes autochtones ou des communautés racisées? Peut-on se servir de ce modèle pour développer une philanthropie basée sur la confiance, aidant à réparer les dommages de la colonisation?

Comment équilibrer des points de vue opposés au sein d’une mission claire?

La nature complexe du changement social exige que les organismes souhaitant avoir un impact possèdent une vision stratégique claire. Les organismes efficaces doivent toutefois aussi demeurer ouverts aux principaux points de vue des différents partenaires et parties prenantes, et doivent réagir rapidement aux changements de contexte, comme une pandémie mondiale. Cette combinaison peut créer des tensions difficiles et dynamiques.

En 2019, la Fondation McConnell a mis au point une stratégie de cinq ans pour accélérer une transition inclusive vers une économie zéro-carbone équitable et a consulté un éventail de parties prenantes. Bien que le processus n’ait pas permis de converger sur une seule stratégie, il nous a aidés à améliorer notre approche, en plus de renforcer les relations entre les différents acteurs et actrices. Cette expérience nous a amenés à nous demander comment les fondations peuvent établir des partenariats ouverts et des consultations continues pour laisser de la place à des désaccords constructifs, un apprentissage partagé et un meilleur alignement entre les nombreux secteurs de la société, ainsi que les réflexes à adopter, quand les circonstances l’exigent, pour s’orienter vers de nouvelles stratégies.

D’un « petit changement », peut-on en générer des grands?

Bien que la dotation de la Fondation McConnell fasse de nous une des plus grandes fondations privées au Canada, nous demeurons un petit joueur dans la plupart des secteurs où nous espérons propulser un changement systémique.

Notre fonds de dotation nous permet de faire des contributions financières et des investissements responsables, mais les avancées sont souvent plus grandes et durables lorsque nous prenons le temps de travailler dans le cadre de coalitions, de collaborations, de partenariats ou des activités de sensibilisation conçues pour influencer des politiques et des systèmes plus vastes. Par exemple, en réponse à la COVID-19, nous nous sommes joints à 70 fondations dans la campagne Give5, qui ont toutes augmenté leur dotation pour répondre à des besoins urgents.

Lors d’un sondage mené récemment par un tiers sur la perception des titulaires de subvention, la plupart des répondantes et répondants ont dit aimer une approche « écosystémique » ou de coalition. Cette approche lie les efforts de plusieurs pour obtenir des résultats allant au-delà de l’atteinte d’un seul organisme ou secteur. D’autres ont exprimé de la frustration, affirmant que créer de grandes initiatives était un processus lourd et confus. Comment pourrions-nous atteindre un équilibre optimal entre les deux?

Comment créer des stratégies de sortie?

La Fondation McConnell appuie des innovations sociales dans le but de participer au changement systémique. Les contributions philanthropiques peuvent aider des projets novateurs à démarrer et se développer. Cependant, une trop grande dépendance envers un seul partenaire financier peut impacter les avancées. Un projet ne pourra être durable que s’il peut devenir autonome en diversifiant ses revenus ou en modifiant des politiques publiques de façon permanente.

Nous encourageons les partenaires à fonctionner ainsi, mais éliminer progressivement le financement de projets individuels peut néanmoins s’avérer difficile, tant pour nous que pour eux. Comment pourrions-nous mieux gérer les attentes, les communications et les échéanciers pour que les partenaires puissent imaginer et obtenir de meilleurs résultats tout en réduisant leur dépendance? Comment collectivement pouvons-nous déterminer quels partenaires terrain devront être soutenus pour qu’ils puissent passer à travers la crise?

À quel point doit-on s’investir dans les systèmes que l’on veut transformer ou remplacer?

Vu l’engagement que nous avons pris d’appuyer la transition vers une économie équitable neutre en carbone, on nous demande souvent si nous allons nous dessaisir des entreprises de combustibles fossiles. Cela revient à décider entre travailler avec elles pour influencer leur direction et leur gouvernance, ou orienter nos investissements vers des entreprises d’énergie renouvelable. Est-ce possible de trouver un milieu entre ces deux approches?

Quand la primauté de la crise climatique nous force-t-elle à choisir le désinvestissement au lieu de continuer à exercer des pressions pour un retrait graduel qui fournira aux travailleuses et travailleurs, ainsi qu’aux communautés du temps et des ressources pour faire la transition? Et qu’en est-il des risques financiers de détenir des actifs dont la valeur future est remise en question? De telles questions, qui n’ont pas de réponses évidentes, façonnent nos discussions sur l’investissement d’impact.

Pouvons-nous accroître l’ampleur de notre portée tout en demeurant enracinés sur le terrain?

Accroître de manière collaborative l’ampleur de la portée d’innovations sociales grâce à un engagement soutenu auprès d’organismes de bienfaisance, des OBNL, du secteur privé, d’institutions publics et de gouvernements fait partie intégrante de la théorie du changement de la Fondation McConnell. Nos efforts sont de plus en plus coordonnés par le biais de collaborations philanthropiques dont le but est d’obtenir des impacts durables face à des enjeux de taille.

Bien que nous entretenions de bonnes relations avec plusieurs partenaires et parties prenantes, et quoique notre mission nous donne une responsabilité morale et juridique envers un plus vaste secteur public, nous sommes une fondation privée et nous n’avons de comptes à rendre qu’à notre conseil d’administration et à l’Agence du revenu du Canada.

Au moment où nous cherchons à créer un changement plus profond dans le cadre d’une stratégie collaborative de défense des politiques et nous visons à « accroître l’ampleur de notre portée », comment pouvons-nous continuer d’agir de façon responsable envers les communautés et nous laisser guider par leur savoir et leurs intérêts? Comment continuer à maintenir des relations saines et vitales lorsque les réunions en personne sont interdites indéfiniment?

Comment la philanthropie privée peut-elle accroître la capacité publique au lieu de la diminuer?

Le secteur public ressent de plus en plus la pression de s’adapter au fur et à mesure que les problèmes sociaux et environnementaux augmentent. Et avec la COVID-19, la responsabilité de l’État s’est avérée encore plus évidente. Les processus gouvernementaux et les structures de responsabilité peuvent toutefois gêner la R&D sociale. Avec l’assouplissement des contraintes des organismes de charité oeuvrant pour la défense des droits et avec l’émergence du journalisme comme activité caritative, les gouvernements souhaitent de plus en plus collaborer avec les organismes de la société civile et les fondations autour de ce que l’économiste Mariana Mazzucato appelle « l’innovation axée sur la mission ». Cette collaboration peut inclure des espaces de dialogue, une participation dans des « laboratoires de solutions », l’octroi de subventions en matière de R&D sociale, un jumelage de contributions pour accroître les enveloppes gouvernementales et la création de fonds axés sur les résultats pour financer conjointement le changement systémique.

Toutefois, l’histoire nous a démontré qu’il existe un réel risque à ce que la philanthropie privée soit perçue comme un substitut de l’État en jouant un rôle qui doit être assumé par des gouvernements élus démocratiquement et financés par l’impôt. Alors que des échanges entre les institutions publiques et les fondations privées s’accentuent, comment ces dernières peuvent-elles s’assurer que leurs efforts viennent accroître et non diminuer la capacité et la responsabilité du secteur public?

Comment se servir de l’évaluation tout en laissant libre cours à l’imagination?

L’évaluation est très utile pour aider les fondations à comprendre l’impact des programmes et éclairer leur prise de décisions. Elle a cependant tendance à mettre de l’avant des stratégies qui se mesurent bien. Cela met donc de côté les approches de changement systémique qui sont trop complexes et interdépendantes pour être évaluées par des outils qui mesurent les causes et les effets.

Ce paradoxe est devenu apparent dans l’initiative WellAhead, qui reposait d’abord sur un modèle de changement ayant fait ses preuves. L’approche initiale visait à apporter un changement progressif une école à la fois, alors que la question du bien-être à l’école exigeait une intervention systémique. À la suite de délibérations, la Fondation McConnell a adopté une stratégie plus ardue à mesurer, visant une transformation systémique à plus grande échelle.

Vu les tensions entre le besoin de mesurer les résultats et la nature émergente de la transformation systémique, comment pourrions-nous utiliser la mesure d’impact sans que cela limite l’innovation?

Les institutions colonisatrices : quand intervenir et quand se tenir à l’écart?

Les 94 Appels à l’action proposés par la Commission de vérité et réconciliation en 2015 donnent un schéma aux Canadiennes et aux Canadiens pour aborder les torts passés commis envers les peuples autochtones. Nous pourrions cependant reproduire les erreurs du passé si nous n’entreprenons pas ces travaux de la bonne façon.

Jusqu’à maintenant, presque tout le travail de réconciliation de la Fondation McConnell a été fait en étroite collaboration avec des innovatrices et des innovateurs autochtones et non autochtones. Non seulement de jeunes projets ont pu ainsi profiter d’une association avec un organisme réputé, mais nous avons aussi appris de la sagesse autochtone qui a été généreusement partagée avec nous.

Alors que nous renouvelons notre engagement envers la réconciliation, nous nous posons la question suivante en compagnie de partenaires, de collègues et de conseillères et conseillers autochtones : Quelle part de nos efforts devrait être consacrée à des initiatives gérées par et pour les peuples autochtones, plutôt qu’à des programmes et partenariats gérés par des fondations?

À quoi un meilleur « non » peut ressembler?

Avec un nombre significatif d’organismes novateurs de la société civile qui soumettent des demandes de financement, la Fondation McConnell doit dire « non » plus souvent qu’elle ne dit « oui ». En 2019, nous avons reçu 685 demandes et pu octroyer 192 subventions. Nous savons que les gens consacrent beaucoup de temps et d’énergie à leur demande, et nous nous appliquons à étudier chacune d’entre elles avec soin. Nous comprenons néanmoins qu’un refus peut sembler décourageant et arbitraire.

Quand une fondation dit « non », cela ne signifie pas qu’un projet ou une question ne mérite pas d’être soutenu. Par conséquent, certaines questions s’imposent : « Comment pourrions-nous structurer le processus d’évaluation pour que même un refus puisse s’avérer utile pour l’organisme ayant soumis une demande? » Quelles mesures de transparence liées à notre processus décisionnel pourraient améliorer la confiance et la compréhension d’un organisme pour savoir comment aller de l’avant avec le projet? Combien de temps devrions-nous consacrer à cette tâche?

Comment notre histoire devrait-elle influencer la réconciliation économique?

Le fonds de dotation de la Fondation McConnell repose sur la fortune amassée par J.W. McConnell au cours de sa vie (1877-1963). Un visionnaire, un homme intelligent et généreux, et un entrepreneur, celui-ci a vécu à une époque où le Canada développait son pouvoir colonial au détriment des peuples autochtones.

La Fondation a octroyé sa première contribution à un organisme autochtone en 2003. Elle appuie aujourd’hui un éventail d’organismes autochtones par le biais de contributions financières et d’investissements. En 2015, nous avons signé, aux côtés d’autres fondations, la Déclaration d’action de la communauté philanthropique lors de l’événement de clôture de la Commission de vérité et réconciliation. Aujourd’hui, nous nous posons, et nous posons à nos pairs, la question suivante : « Comment les fondations pourraient-elles faire progresser la réconciliation économique au cours de la prochaine décennie? »

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Introduction

Notre série annuelle des 12 leçons est différente des séries précédentes. Elle se concentre sur l’avenir plutôt que de réfléchir à ce que nous avons appris au cours de l’année écoulée. C’est pourquoi nous l’avons appelée « 12 leçons à apprendre » .

Au moment où nous avions finalisé le texte et la présentation visuelle des leçons, la COVID-19 a frappé le Canada et a changé à jamais le contexte de notre travail. Au cours de l’année 2020, nous avons été témoins d’autres événements historiques, notamment un vaste mouvement visant à mettre fin au racisme systémique tant dans la société que ses institutions. Nos premières « leçons à apprendre » ne semblaient plus aussi adaptées ni pertinentes. Nous les avons mis hors ligne pendant un certain temps, et durant cette période, notre propre Fondation a connu une transition majeure : le départ à la retraite de Stephen Huddart, et la nomination de Lili-Anna Pereša pour le remplacer en tant que présidente et directrice générale. 

Nous avons maintenant jeté un second regard critique sur nos leçons et fait de notre mieux pour qu’elles puissent correspondre à l’évolution rapide du monde. Nous espérons que certaines d’entre elles trouveront un écho parmi vous. Si vous avez des questions ou des commentaires sur ce projet, vous pouvez nous faire parvenir un courriel à communications@mcconnellfoundation.ca.

À propos

12 leçons est un résumé de leçons apprises, de vieilles pratiques ou de croyances à désapprendre, ou de choses à apprendre à l’avenir – généralement exprimées par le personnel de la Fondation McConnell, mais parfois également par d’autres personnes au sein de nos réseaux. Chaque année, le thème et la présentation visuelle de 12 leçons varient. Ce projet a été mené chaque année de 2016 à 2020. L’objectif est d’être transparent sur le travail philanthropique, et de partager nos apprentissages de ce qui va bien et de ce qui doit être amélioré.

Pourquoi 12 leçons ? Au départ, nous voulions recueillir une leçon chaque mois. Nous avons conservé le chiffre 12, même si les leçons ne sont plus associées à un mois particulier de l’année. Nous trouvons que c’est un nombre maîtrisable avec lequel nous pouvons travailler. Nous pouvons nous engager à suivre 12 leçons par an!

Pour toute question, veuillez communiquer avec info@mcconnellfoundation.ca.